Chaque mois, un juriste de L’ Appel Expert examine trois des questions qui lui ont été soumises par des élus du personnel. Ce mois-ci, nous avons choisi de traiter des problématiques liées à la crise sanitaire : « Un CSE peut-il faire un don à une association ? Comment s’assurer de la confidentialité des échanges d’emails entre salariés et membres du CSE ? L’employeur peut-il imposer à un élu d’utiliser toutes ses heures de délégation à la même date en une seule fois ? »
Dans le cadre du service de renseignement juridique par téléphone du groupe Lefebvre-Sarrut (*), les juristes d’Appel Expert sont souvent sollicités par des élus du personnel. Nous avons eu l’idée de leur demander de choisir trois questions qui leur ont été soumises et d’y répondre. Voici leur sélection pour ce mois de mai.
 
Question n° 1
« Un CSE peut-il faire un don à une association ? »

 

► La réponse de Stéphanie Ménégakis-Lacheré, juriste à l’Appel Expert
 
 Oui, le CSE peut donner à une association une partie de son budget ASC
 
En effet, le CSE peut décider de faire don à une association d’une partie de son budget des activités sociales et culturelles (ASC). Cette question a été fréquemment posée pendant la crise sanitaire, certains CSE souhaitant réaliser des dons au profit d’associations de soutien aux soignants par exemple. L’article L. 2312-84 du code du travail indique qu’en cas de reliquat budgétaire, les membres de la délégation du personnel du CSE peuvent décider, par une délibération, de transférer tout ou partie du montant de l’excédent annuel de ce budget. L’article R. 2312-51 du même code précise cependant que cette possibilité est limitée à 10 % de l’excédent budgétaire du budget ASC. Attention, la somme ainsi donnée et ses modalités d’utilisation doivent être inscrites dans les comptes annuels du CSE ainsi que dans le rapport annuel d’activité et de gestion (dans les entreprises d’au moins 50 salariés). Les CSE peuvent donner des fonds à l’association de leur choix. S’il s’agit d’une ou plusieurs associations humanitaires reconnues d’utilité publique afin de favoriser les actions locales ou régionales de lutte contre l’exclusion ou des actions de réinsertion sociale, la délibération du CSE doit préciser les destinataires des sommes et, le cas échéant, la répartition des sommes transférées.
 
Question n° 2
« Comment s’assurer que les emails échangés entre les salariés et les membres du CSE restent confidentiels ? »

 

► La réponse de Stéphanie Ménégakis-Lacheré, juriste à l’Appel Expert

Le mieux est de conclure un accord avec l’employeur 

Cette question est tout à fait légitime car les membres du CSE peuvent avoir besoin de communiquer avec les salariés, et l’email a été très utilisé pendant le confinement lié à la crise sanitaire. Il n’existe pas de disposition légale venant régler cette question. Pour prévoir cette confidentialité, le mieux est donc de conclure un accord avec l’employeur. Du côté de la jurisprudence, un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 6 avril 2004 (n° 02-40.498) a jugé que pour l’accomplissement de leur mandat électif ou syndical, le délégué syndical ou le représentant du personnel doit pouvoir disposer « d’un matériel ou procédé excluant l’interception de leurs communications téléphoniques et l’identification de leurs correspondants ». On peut étendre a priori cette solution aux emails. Par ailleurs, un autre arrêt de la Cour de cassation du 26 janvier 2016 (n° 14-15.360) a précisé que tout envoi d’un mail par un salarié depuis sa messagerie personnelle est protégé par le secret des correspondances. Cette solution peut de même être étendue aux emails des salariés protégés.

 

Question n° 3
« L’employeur peut-il décider que les heures de délégation d’un élu du personnel seront prises en une seule fois ? »

► La réponse de Stéphanie Ménégakis-Lacheré, juriste à l’Appel Expert

Non, cette prérogative de l’employeur n’est pas prévue par le code du travail 
 
L’employeur ne peut pas décider du moment où sont utilisées les heures de délégation car cette prérogative n’est pas prévue par le code du travail. l’employeur n’a pas non plus à donner son autorisation pour l’utilisation du crédit d’heure. Dans un arrêt du 10 mars 1981, la Cour de cassation a jugé que l’octroi d’un bon de délégation permettant aux représentants du personnel d’effectuer leurs déplacements légalement autorisés ne peut d’aucune façon être subordonné à l’autorisation préalable de l’employeur. La cour d’appel qui constate que le représentant du personnel avait informé son chef de service de son déplacement et avait été sanctionné pour n’avoir pas attendu la décision de sa direction constate ainsi un délit d’entrave. On peut cependant apporter une nuance : l’employeur peut être tenu informé du moment où le représentant du personnel quitte son poste et s’absente pour exécuter son mandat et utiliser son crédit d’heure, et ce pour des raisons de sécurité.

Source – Actuel CSE