Le représentant du personnel qui obtient la résiliation judiciaire de son contrat aux prud’hommes ne peut pas ensuite exiger d’être réintégré. Et ce quand bien même la rupture du contrat produit les effets d’un licenciement nul pris en violation du statut protecteur par l’employeur.

Tout salarié qui estime que son employeur manque gravement à ses obligations contractuelles peut saisir le conseil de prud’hommes afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat. Lorsque l’auteur de cette action est un représentant du personnel, la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul en violation du statut protecteur et ouvre droit au paiement d’une indemnité égale à la rémunération que le salarié aurait dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection en cours au jour de sa demande. Mais, plutôt que de percevoir cette indemnité, l’élu peut-il exiger d’être réintégré dans son poste ? La Cour de cassation vient de répondre à cette question.

Modification du contrat imposée à un délégué du personnel
Le responsable administratif montage décor d’une PME, délégué du personnel, saisit les prud’hommes en février 2011 d’une demande de résiliation judiciaire. Le salarié se plaint en particulier d’une modification de ses fonctions imposée par l’employeur. Cette modification unilatérale du contrat de travail est attestée par les juges et considérée d’une gravité suffisante pour prononcer en novembre 2011 la résiliation du contrat. Plutôt que de percevoir ses indemnités de rupture, le salarié réclame, avec l’appui de son union locale CGT, d’être réintégré dans son poste de responsable administratif. Mais est-ce seulement possible ?
Pas de retour possible après la résiliation judiciaire du contrat
En 2013 notamment, la Cour de cassation a décidé que la prise d’acte (*) « entraîne la rupture immédiate du contrat de travail et ne peut être rétractée » de sorte que le salarié protégé « ne peut ultérieurement solliciter sa réintégration dans son emploi » (notre article). En est-il de même pour la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l’employeur ? Oui, répond d’abord la cour d’appel de Versailles, selon laquelle la réintégration est « contradictoire et incompatible avec la demande de résiliation du contrat de travail ». Ce refus de prononcer la réintégration du représentant du personnel est approuvé en cassation. Si l’action en résiliation judiciaire du contrat est un succès, l’indemnisation pour violation du statut protecteur est donc la seule voie possible.
(*) Quelle différence entre la prise d’acte et la résiliation judiciaire ?
La différence principale entre la prise d’acte de rupture et la demande de résiliation judiciaire est que dans le premier cas le salarié quitte l’entreprise alors que dans le second il reste en poste jusqu’à la décision des prud’hommes. Dans les deux cas, le juge doit décider si les motifs de rupture sont justifiés. Attention toutefois, la prise d’acte reste risquée : le juge peut très bien l’analyser comme une démission.

Source – Actuel CE